Les barrières de sécurité : une composante essentielle de la maîtrise des risques d’accident majeur

Une barrière de sécurité remplit une fonction de sécurité permettant de prévenir un scénario d’accident, ou de limiter ses conséquences. L’une des exigences de l’étude de dangers est d’identifier et évaluer les barrières de sécurité contribuant à la maîtrise des risques d’accidents majeurs.

L’évaluation de leur performance doit reposer sur des critères et méthodologies adaptés et en prenant en compte les spécificités du site sur lesquelles elles sont implantées : les barrières doivent donc être conçues et mises en oeuvre selon le ou les scenarios dans lesquels elles interviennent, ainsi que selon les caractéristiques techniques et organisationnelles du site et de son environnement.

Typologie des barrières de sécurité

Une grande variété de types de barrières de sécurité sont mis en œuvre dans des sites industriels, pour en maîtriser les risques, par exemple : des actions d’opérateur, des dispositifs mécaniques actifs (de type soupapes) ou passifs (cuvettes de rétentions), des automatismes de sécurité…
Les principales actions assurées par les fonctions de sécurité dans les installations classées sont : empêcher, éviter, détecter, contrôler ou limiter.
Les fonctions de sécurité identifiées peuvent être assurées à partir d’éléments techniques de sécurité, des interventions humaines, ou la combinaison des deux. Selon la nature des éléments mis en œuvre, on déterminera le type de la barrière :

Barrières
Schéma Ineris

Intégration dans l’étude de danger

Dans le contexte des études de dangers, la réglementation définit les mesures de maîtrise des risques (MMR) comme une catégorie de barrière de sécurité agissant sur les scénarios d'accidents majeurs en réduisant la probabilité des phénomènes dangereux potentiels, ou la gravité des accidents qui leur sont associés et en répondant simultanément à des exigences d’efficacité, de temps de réponse maintenues dans le temps.
L’article L. 181-25 du Code de l’environnement indique que « [L’étude de dangers] définit et justifie les mesures propres à réduire la probabilité et les effets de ces accidents ». L’article 4 de l’arrêté du 29 septembre 2005, dit arrêté PCIG, stipule que « pour être prises en compte dans l’évaluation de la probabilité, les mesures de maîtrise des risques doivent être efficaces, avoir une cinétique de mise en œuvre en adéquation avec celle des événements à maîtriser, être testées et maintenues de façon à garantir la pérennité du positionnement précité ».

Une mesure de maîtrise des risques performante permet de réduire la probabilité d’occurrence d’un scénario d’accident, ou dans de plus rare cas, la gravité du scénario.

processus
Schéma Ineris

Dans ce contexte, les méthodes et critères de définition d'évaluation des mesures de maîtrise des risques doivent être clairement définis et adaptés aux différentes technologies ou opérations réalisées, ainsi qu’à leur contexte d’utilisation. On cherche en particulier à évaluer leurs performances, en suivant les principaux critères :

  • indépendance ;
  • efficacité ;
  • temps de réponse ;
  • fiabilité ;
  • maintien des performances dans le temps.

Les MMR ainsi évaluées peuvent ensuite être valorisées dans l’évaluation du risque, au travers de leur efficacité à réduire la gravité et de leur fiabilité pour réduire la probabilité du scénario considéré.

Evaluation des Barrières

Pour répondre aux différentes exigences relatives à l’étude de dangers, l’évaluation des mesures de maîtrise des risques couvre différentes étapes de leur cycle de vie (spécification, conception, exploitation).

schema
Schéma Ineris

 

La définition des fonctions de sécurité est une étape souvent négligée dans l’évaluation des barrières de sécurité. Les fonctions de sécurité doivent être déterminées au regard des scénarios d’accidents majeurs identifiés lors de l’analyse des risques. Il s’agit de déterminer sur quels scénarios agit la barrière et comment elle agit sur le scénario d’accident, afin d’évaluer le risque résiduel.
La description d’une barrière de sécurité consiste à identifier l’ensemble des éléments techniques, humains et organisationnels nécessaires à la réalisation de la fonction de sécurité et à décrire leur fonctionnement.
Une barrière doit être indépendante du scénario d’accident sur lequel elle intervient et des autres barrières intervenant sur le même scénario. Cette propriété permet de justifier l'application d'une défense en profondeur, qi est un fondement de l'approche barrière.
L’évaluation des performances se fonde sur trois critères définis par la réglementation : l’efficacité, le temps de réponse et le niveau de confiance :

  • l’efficacité de la barrière est sa capacité à ramener ou maintenir le système dans un état de sécurité ;
  • le temps de réponse est le temps nécessaire à la barrière pour ramener le système dans un état de sécurité, il doit être compatible avec la cinétique du scénario ;
  • le niveau de confiance caractérise la fiabilité de la barrière. Il s’agit en général d’une évaluation semi-quantitative de la probabilité de fonctionnement lorsqu’elle est sollicitée (c’est-à-dire une classe de probabilité forfaitaire affectée suivant la réponse à des critères qualitatifs).

L’évaluation des performances peut être réalisée à partir du référentiel de l’Ineris Omega10 pour les barrières techniques ou Omega 20 pour les barrières humaines. D’autres référentiels peuvent être appliqués, comme la note de doctrine sur les mesures de maîtrise des risques instrumentées ou la norme IEC61508 pour les Mesures de maîtrise des risques instrumentées.
Le maintien des performances dans le temps se justifie au travers de l’application de règles d’exploitation et de maintenance des barrières et par la démonstration périodique de la performance par des tests de fonctionnement.
Le retour d’expérience qualitatif ou quantitatif sur la barrière permet de vérifier qu’elle est utilisée et répond comme prévu lors de son évaluation.
Ces deux derniers points permettent de répondre à des exigences de maîtrise du vieillissement des barrières, définies en particulier par le Guide méthodologique pour la gestion et la maîtrise du vieillissement des MMRI. Les moyens mis en oeuvre pour maintenir la performance des barrières dans le temps et le retour d'expérience figurent parmi les dispositifs constitutifs du système de gestion de la sécurité (SGS).

Expertise de l’Ineris

L’Ineris propose des documents de référence établissant des bases éprouvées pour l’évaluation des barrières et cherche à maintenir et faire évoluer ses compétences pour s’adapter aux évolutions technologiques organisationelles des barrières et des installations qu’elles protègent.

L’ineris réalise des prestations de conseil pour les industriels en évaluant les barrières mises en œuvre par les exploitants d’installations classées ou les produits développés par les fournisseurs de ces installations. Par ailleurs l’Ineris réalise des études dans le cadre de ses missions d’appui aux pouvoirs publics et des opérations de recherche sur les nouvelles technologies utilisées pour la maîtrise des risques.

Dans le cadre de ses missions d’appui, l‘Ineris a développé et tiens à jour les guides de référence Omega 10 (Evaluation des barrière technique) et Omega 20 (évaluation des barrières humaines) qui synthétisent les critères de performances adaptés à chaque type de barrière et posent les bases méthodologiques de leur évaluation. Ces guides sont largement utilisés dans la réalisation d’études de dangers.

Dans le cadre de ses activités de recherche, l’Ineris maintien ses compétences sur les technologies émergentes utilisées pour les barrières de sécurité comme par exemple l’Intelligence Artificielle. Ces technologies, notamment les technologies numériques innovantes, ont un impact sur la manière d’évaluer les barrières d’un point de vue technique et peuvent également avoir des conséquences sur l'organisation du travail et les conditions d'intervention des opérateurs, et donc sur la performance des barrières de sécurité (systèmes autonomes, téléopération…).

Ces différents travaux visent à améliorer la maîtrise des risques sur les installations industrielles en :

  • améliorant les moyens de démonstration de l’atteinte et du maintien dans le temps de niveaux de performances adaptés au risque ;
  • prenant en compte les évolutions techniques et organisationnelles et notamment en y adaptant les critères et méthodes dévaluation pour maintenir le niveau de maîtrise des risques dans un contexte en mutation ;
  • intégrer les évolutions réglementaires dans l’évaluation des barrières(note de doctrine sur les mesures de maîtrise des risques instrumentées, plan de modernisation des installations industrielles, arrêtés post-lubrizol, par exemple).

Référentiels utilisés pour l’évaluation des performances

Références réglementaires

  • arrêté du 26/05/14 modifié par l’arrêté du 28 février 2022 relatif à la prévention des accidents majeurs dans les installations classées mentionnées à la section 9, chapitre V, titre Ier du livre V du code de l’environnement (transposition de la directive Seveso 3).
  • arrêté ministériel du 29/09/05 : probabilité d’occurrence, cinétique, intensité des effets et gravité des conséquences des accidents potentiels dans les études de dangers des ICPE.
  • airculaire du 10/05/10 : règles méthodologiques applicables aux études de dangers, à l’appréciation de la démarche de réduction du risque à la source et aux PPRT.
  • arrêté du 4/10/10 modifié par l’arrêté du 28 février 2022 : prévention des risques accidentels au sein des ICPE soumises à autorisation.
  • note du 2 octobre 2013 de doctrine sur les mesures de maîtrise des risques instrumentées (MMRI).

Références bibliographiques